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Les Fausses abandonnées
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11 décembre 2006

Dana Everyne 18/26

Néanmoins, Monsieur Ségla rompt l'atmosphère tendue et s'adresse à moi le plus professionnellement possible. Il me pose toutes sortes de questions sur mon expérience, sur mes études, sur mon projet professionnel. J'essaie de répondre sans bégayer, je réfléchis avant pour ne pas dire n'importe quoi. Et puis, il m'explique en quoi consiste le boulot de serveuse au Louvre, les responsabilités, les horaires, le salaire. J'écoute avec attention, hochant la tête à tout bout de champ pour montrer que je comprends, que ça me convient. Pendant tout ce temps, Madame Ouissal reste en retrait, elle est trop préoccupée à regarder de biais Monsieur Ségla pour prendre part à l'entretien. Ce dernier n'arrête pas de gigoter maladroitement, comme s'il voulait esquiver ces oeillades. Je fais en sorte de rester concentrée sur ce qu'il dit, mais mon attention est sans cesse retenue par leur jeu amoureux. Je présage que la réconciliation n'est pas loin.
    - " Et bien, Mademoiselle Everyne, je crois qu'on a fait le tour. Est-ce que vous avez des questions ?
    - Euh... A vrai dire, vous avez répondu clairement à toutes les questions que je m'étais posées avant de venir.
  - Tant mieux, tant mieux. Ce qu'on va faire maintenant, c'est faire le bilan des quatre ou cinq candidatures qu'on a vues jusqu'à présent. Et on vous rappellera d'ici... on est lundi... disons qu'on vous rappellera jeudi. Cela vous convient ?
    - Bien sûr.
    - On fait comme ça, alors ? Que ce soit positif ou négatif, on vous appelle jeudi au plus tard. C'est toi qui a son numéro, Bergite ? "
    Aussitôt, comme s'il n'attendait que ça depuis le début, Monsieur Ségla se retourne vers la dénommée Bergite. Perdue qu'elle était dans sa contemplation, elle est surprise de se voir prise en flagrant délit. D'un geste mal assuré, elle fouille dans ses papiers à la recherche de mon dossier, s'empêtre dans son bazar alors que j'aperçois ma photo sagement posée devant elle, avec toutes mes coordonnées. Quand elle la remarque à son tour, elle relève la tête avec un sourire timide et embarrassé :
    - "Oui, oui, je l'ai. 06 57 54 87 78, c'est bien ça ?
    - Tout à fait. "

    Je me retrouve à nouveau dehors, libérée d'un grand poids. J'éprouve un grand soulagement en sortant de l'enceinte du Louvre, et en même temps, l'angoisse de la réponse commence à pénétrer mes neurones.
    Je m'installe à la terrasse d'une brasserie, commande un croque-monsieur. Et puis je me convoque moi-même, une sorte de réunion au sommet, pour savoir si j'ai été à la hauteur ou pas. J'ai beau chercher des impressions négatives, celle qui revient sans arrêt est celle de la satisfaction. Je ne sais pas ce qu'en penseront Madame Ouissal et Monsieur Ségla, s'ils prendront seulement le temps de parler de moi après avoir réglé leurs problèmes. Comment vont-ils réussir à mener ces deux choses de front ? Ne vont-ils pas se laisser accaparer par leur histoire personnelle et négliger la mienne ? Quand je pense que mon destin est entre leurs mains ! Ce n'est pas très rassurant ! Et puis, tant pis ! Si ça doit marcher, ça marchera. En tout cas, j'aurais fait ce qu'il faut...

 
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