Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Les Fausses abandonnées
Les Fausses abandonnées
Derniers commentaires
29 décembre 2006

Nicole Vivek 9/16

- J'ai toujours voulu être danseuse.
    - Danseuse ? Ah, tu vois ! Quand je disais que je te voyais dans le monde artistique ! Danseuse de quoi ?
    - Danseuse de quoi ?
    - Ben oui ! Classique, moderne, danse de salon, danse sportive, qu'est-ce qu'il y a d'autre... hip-hop, flamenco...
    - Je n’ai pas eu le temps de savoir dans quoi je voulais me spécialiser. Tout ce que je voulais moi, c'était danser, un point c'est tout.
    - En faire ton métier ?
    - Pourquoi pas ! Quand j'étais petite, je croyais être destinée à la danse. Mais sur ce coup, la chance ne m'a pas été favorable.
    - La chance... C'est un peu facile de lui mettre ça sur le dos.
    - Je sais, je ne devrais pas. Oh, tu sais, depuis j'ai fait du chemin. La danse reste un loisir.
    - Tu suis des cours ?
    - Non. "
    Je sens que ce n'est pas la bonne réponse. Ça fait tilt dans ma tête. Laisser une décision au hasard, par pur dépit, jouer mon métier au dé, je l'ai fait sans remords. Mais s'il y a une chose à laquelle j'aurais du me raccrocher avec plus de rationalité, c'est bien la danse. J'ai tout abandonné parce que je pensais que c'était ce qu'on attendait de moi. Mais qui est ce on ? Mes parents ? Mes amis ? Ils ne sont responsables de rien, seulement de vouloir le meilleur pour moi. Séleste n'a pas réagi à ma réponse. Elle regarde la couverture de son livre, elle semble perdue dans ses pensées, et pourtant, sans lever la tête, elle murmure :
    - Les regrets ne servent à rien. Ils ne font que nous rappeler de mauvais moments. Faire de la danse ton métier, c'est de toute manière trop tard. Ce n'est pas à quoi... vingt-sept, vingt-huit ans qu'on commence à courir les castings, surtout si on n'a aucune formation.
    - Je sais.
    - On a tous cette part de passé dont on n'arrive pas à se séparer.
    - C'est quoi pour toi ? Si ce n’est pas indiscret... "
    Elle ne répond pas tout de suite. Elle manipule son livre avec maladresse. L’enthousiasme que je lui connais depuis le début s'est estompé. On est peut-être allé un peu loin dans les confidences, et pourtant :
    - " A dix-sept ans, je suis tombée enceinte. Je ne pouvais pas le dire à mes parents et je n'avais personne à qui me confier. Même le père ne l'a jamais su. En fait, je n’ai pas beaucoup réfléchi. J'ai réalisée que j'étais enceinte une semaine avant le délai légal, et prise de panique, je me suis faite avorter. A l'époque, je n'avais pas conscience de la gravité de mon acte. Quatre ans après, mon copain, le même, m'a demandé de lui faire un bébé. J'étais ravie, mais le bébé ne venait pas. On a fait des analyses, et on a découvert que j'étais devenue stérile. En apprenant ça, Melki m'a fait comprendre qu'il n'envisageait pas l'avenir sans enfant, et il m‘a quittée. Aujourd'hui, ça va. Mais ça n'a pas été facile de tourner la page, j'en avais gros sur la conscience.
    - Je... je suis désolée. Et moi qui me plaignais de ne pas être danseuse !

Publicité
Commentaires
Les Fausses abandonnées
Publicité
Publicité